Test du contraste de phase interférentiel de Nikon


Le matériel:
Poussé par ma curiosité envers les anciens dispositifs, j'ai acheté ce système  à la veuve d'un microscopiste du CFM. Il est différent du contraste interférentiel selon Nomarski que Nikon vendait déja pour cette gamme de microscopes (série "S" dans les années 1960-70 )

CPI

Il y a peu d'indications sur le WEB,  mais néanmoins une description existe sur microscopyu

J'ai aussi trouvé une photo du dispositif postée par un autre propriétaire, mais pas de photos de résultats.

Cela semble un dispositif peu répandu. Il a été supplanté par le contraste interférentiel Nomarski pour la recherche avec dispositif couteux, et par le contraste de phase classique moins cher  pour la routine.
Voici ce système monté sur un statif S-Ke NikonCPI sur SKe


Principe:                                                
Schéma CPI par Pluta
C'est donc plutot un objet de collection mais, néanmoins, j'ai voulu le tester!

J'ai cherché d'abord  à comprendre grace à la documentation disponible le principe de ce système.
Je l'ai trouvé dans la notice d'utilisation (fournie sous forme d'un fichier .pdf par un internaute )  et dans un manuel de Pluta d'ou est tiré le schéma ci-contre.

Le tube supérieur permet, grace au renvoi de 2 prismes et au jeu de 2 groupes de lentilles, de reprendre l'image de la pupille de sortie de l'objectif (ce dispositif évoque la construction du modèle NS400 Nachet ) et d'y placer la lame SP.
SP est un polarisant avec un diaphragme en anneau.
Cette lame est entre le polariseur P et l'analyseur A.
C est une lame 1/4 d'onde.

Le condenseur comporte comme un condenseur phase une tourelle de diaphragmes en anneau (D et O).
Il y a combinaison entre de la lumière directe passant par ce diaphragme et de la lumière diffractée passant par le polariseur hors anneau.
On a donc un contraste de phase ou l'interaction entre l'onde directe et l'onde diffractée  est modulée.

Finalité de ce système:
L'intérèt de ce système est d'abord la possibilité d'utiliser des objectifs sans plaque de  phase pour du contraste de phase.
Il permet surtout de produire un contraste coloré variable différent du contraste de phase habituel.
C'est aussi enfin d'après la notice, la possibilité pour les scientifiques de mesures, par le degré de rotation du polariseur, de différences de phase ou d'indice de réfraction de fluides.

Règlages à réaliser selon la notice Nikon:

- Nécessité de bien règler l'éclairage selon Koehler avec l'image du filament de la lampe dans le plan du diaphragme d'ouverture.
- Nécessité de centrage des diaphragmes annulaires du condenseur pour chaque objectif. (comme habituellement en CP )
- Attention à l'effet du milieu de montage
- Placer au départ l'analyseur en position 45° des graduations et le polariseur en position 90°
     - En lumière colorée, tourner le polariseur légèrement pour le meilleur contraste coloré puis ensuite tourner l'analyseur pour des couleurs plus "claires"
     - En lumière monochromatique (filtre vert) placer le polariseur à 120-130° pour obtenir un fond noir. Puis un décalage dans un sens ou l'autre permet d'avoir un effet de contraste positif ou négatif.

Ce n'est pas très facile à appliquer car il n'y a pas de critères très objectifs à atteindre, mais c'est une base pour opèrer!

Premières manipulations
A l'occasion du centrage, j'ai regardé l'image de la lame SP avec une "lunette de centrage" des anneaux de phase.
Voici le résultat sommairement photographié au compact avec 3 positions du polariseur:
plaque SP du CPI
Sur ces images, le diaphragme annulaire est plus sombre à 150°.
La couleur est rouge à 120° bleue à 150°...
L'analyseur étant à la position 45°. Il devrait y avoir croisement et extinction vers 135°. C'est effectivement la position ou le fond est le plus sombre et autour de laquelle se fait la bascule rouge vers bleu.

La relecture d'une partie de la notice permet d'avancer:

En lumière blanche, l'interférence entre onde directe et onde diffractée produit les couleurs du schéma en fonction de la position du polariseur pour le fond et d'autres couleurs en fonction de l'indice de réfraction et de l'épaisseur du sujet.

Ces différences de couleurs permettent les mesures mises en avant pour le système.

( Ce fonctionnement me semble à mettre en relation avec celui du microscope polarisant sur les matériaux biréfringents; dans les 2 cas, les différences de couleurs d'interférences renseignent sur la nature et l'épaisseur du matériau.)
couleurs CPI


Quelques premiers essais de photos:
Une image  test simple, cellules de l'épithelium buccal

 objectif 40x, oculaire HKW 10x, capteur 24x36mm

d'abord témoin sans le dispositif avec le mème microscope, mais diaphragmée pour faire ressortie comme en CP les petits éléments mème hors profondeur de champ.
40x normal

Essai en lumière blanche
40x normal
règlages de base du système
(polariseur position 90° et analyseur position 45°)
CPI col1
polariseur décalé
.
CPI col
polariseur plus décalé
.

Essai en lumière"monochromatique"
(filtre IF550 Olympus )
CPI mono
polariseur 130°

CPI mono
polariseur 90°

Conclusions:
Esthètiquement, c'est très en dessous du contraste interférentiel différenciel Nomarski. Il n'y a pas la mème richesse de détail. Il me semble apparaitre moins de contraste coloré.
L'intérèt est donc plus dans le fonctionnement et la théorie optique mise en jeu...
Peut être y a t il malgré tout  des usages particuliers à retenir pour que ce beau matériel des années 1960 ne soit pas qu'objet de collection?

Pour l'instant,  je dois avouer qu'il m'est difficile de maitriser le résultat car le règlage de mise au point modifie l'effet des positions des polarisants. Je ne sais pas pour l'instant obtenir à volonté tel effet (en particulier, ce serait intéressant d'avoir des détails au choix en positif ou en négatif. )

Je vais poursuivre en faisant une 2e série de test sur un autre sujet.
Mais s'il y a d'autres utilisateurs, je serais heureux de lire leurs témoignages et leurs conseils avant de finaliser ce texte...

Daniel NARDIN 27 juillet 2015